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mardi 19 février 2019

Le Monde de Graha, Yse chapitre 15


Le Monde de Graha

Volume 1


«J’ai toujours voulu faire de grandes choses, mais je n’avais pas prévu que ce serait de grandes bêtises.»


- Kalissa (héroïne), Les Contes de Bartahma

Chapitre 15 : Cruelle Vérité



- Heureusement que je t’avais demandé de ne pas t’endormir, lança Barrold les bras croisés.

Yse émergeait difficilement de son sommeil, quelle heure était-il ? Depuis combien de temps étaient-ils arrivés ici ? Qu’allaient-ils faire ? Trop de questions dès le réveil. Lorsqu’elle glissa un regard en direction de la fenêtre, la jeune fille aperçut une lueur rougeâtre dans le lointain, signe qu’il devait être plus tard qu’elle ne l’imaginait.

- Où est-ce qu’on va ?, parvint-elle à articuler malgré sa bouche pâteuse.

- Je ne sais pas très bien, Pantonas nous a donné rendez-vous dans la salle du conseil.

- Pantonas ?

- Le directeur.

- Ah, oui, celui-là, dit Yse en se frottant maladroitement les yeux.

Le libraire arqua un sourcil.

- Tu en connais beaucoup des Pantonas ?

- Eh bien, elle réfléchit un court instant, non mais dans un livre que j’ai lu il y avait…

- On est pas dans un livre Yse !, coupa Barrold un peu brusquement.

Agacée par l’attitude de son ami qui lui prenait le chou à peine réveillée, Yse ne put s’empêcher de lui rétorquer d’un ton acide :

- Figures-toi que je suis passée par un livre je ne sais comment avant d’atterrir ici, donc si, de mon point de vue on est dans un bouquin.

- Laisse-tomber, soupira Barrold, viens on va être en retard.

Les deux compagnons quittèrent la chambre de la jeune fille et filèrent droit en direction de la grande salle du conseil. Arrivée devant la porte, le cœur de la pauvre enfant battait à tout rompre et elle ne parvenait pas à comprendre pourquoi elle se sentait aussi stressée. Le jeune libraire toqua trois coups secs sur la porte en bois et une voix étouffée de l’autre côté lui répondit d’entrer.
Cette salle paraissait toujours aussi sombre aux yeux de Yse, bien que des fenêtres soient présentes en haut des longs murs de pierres et que les nombreux lustres illuminaient la pièce. Autour de cette longue table, toutes les chaises de bois clair étaient désormais occupées. Des têtes plus ou moins familières à la petite étrangère, comme ce renard de Kloph ou la professeure qui avait accaparé Barrold en arrivant. Enfin, au bout de cette étrange et interminable table, on trouvait Pantonas, le coude posé sur la table, se pinçant le front avec un air soucieux sur son visage déjà si sérieux d’ordinaire.

- Silence !, somma le directeur pour faire taire les dernières conversations.
Tous les regards se tournèrent comme un seul homme vers les deux amis, une boule d’angoisse se forma dans l’estomac de la jeune fille.

- Bien vous voilà, reprit Pantonas d’un ton plus calme. Je vous présente le conseil de l’académie, jeune demoiselle.

Yse ne sut quoi répondre et, pour ne pas paraître impolie envers son hôte, elle courba légèrement la tête en signe qu’elle espérait de respect.

- Nous avons longuement discuté de votre cas, vous êtes la première étrangère venue de « l’autre côté » et vous devez savoir que nous attendons une personne telle que vous depuis des siècles.

Si elle avait été en mesure de répondre, Yse aurait sans doute voulu faire un grand discours, mais sa gorge était devenue plus sèche que le désert du Sahara et sa voix s’était faite plus discrète qu’un filet d’air.

- Avant que nous allions plus loin dans cette conversation, Barrold, lui avez-vous parlé de notre secret avant son arrivée ici ?

Le jeune garçon ne répondit pas tout de suite. Il baissa la tête comme pour réfléchir, puis jeta un rapide coup d’œil à son amie.

- A vrai dire monsieur, je ne crois pas être celui qui lui a appris l’existence de l’Oracle.

Ses mots soulevèrent un brouhaha énorme dans la salle. Des cris de surprise, d’indignation et autres.

- Si-lence !, tonna une nouvelle fois le directeur. Le calme revint peu à peu.

- Qui, qui d’autre connaît l’existence de l’Oracle au sein de notre école ? Répondez !

On pouvait entendre la colère dans la voix du directeur, mais elle était plus guidée par la peur et l’inquiétude que par la contrariété. Barrold se tourna vers Yse.

- Dis-leur, lui chuchota-t-il avec un léger sourire.

Avaient-ils seulement le choix ?

Yse prit une grande inspiration, ferma les yeux un instant et fouilla dans son esprit puis attrapa la première chose dont elle se souvint. Elle rouvrit ses yeux bleus qu’elle posa sur l’assemblée qui retenait son souffle. C’est les mains tremblantes mais d’une voix étonnamment claire et assurée qu’elle leur dit :

- C’est un Leïlor qui m’en a parlé.

D’abord, il y eut le silence complet, puis de nouveau un brouhaha de voix et de cris. Pantonas paraissait si déconcerté par cette nouvelle qu’il ne faisait même plus attention au boucan environnant. Yse jeta un œil vers Kloph, celui-ci n’avait pas bougé depuis le début de l’échange, il gardait la tête baissé, les yeux fermés et les bras croisés. Au bout d’un long moment, les voix baissèrent de volume, jusqu’à de nouveau faire place à un silence royal.

- Un… un Leïlor ? , articula Pantonas, il se prit le menton, mais ces créatures ne sont plus… se sont... des légendes… je ne connais qu’une personne qui prétend avoir vu un Leïlor et c’était il y a plus de quarante ans.

- Je ne vous mens pas, continua Yse, j’ai vu un Leïlor et je lui ai parlé. Je ne sais pas comment elle était au courant mais elle m’a parlé de… , la jeune fille hésita avant de poursuivre, … de l’Oracle.

Elle avait l’impression d’avoir dit un gros mot, pourtant il ne s’agissait que d’un mot ordinaire, en tout cas pour elle. Beaucoup de professeurs semblaient ulcérés d’avoir entendu un tel mot être prononcé dans sa bouche, mais le directeur lui restait calme et posait un regard indéchiffrable sur elle.

- Je vois, finit-il par dire, aux vues de ce que vous nous apprenez, nous n’avons pas le choix.

Il s’adressa aux professeurs attablés.

- Chers professeurs, je me plierai comme toujours à la règle de la majorité, et bien que cela implique une transgression des lois, sa majesté en personne a donné son accord. Je me dois de vous le demander et de moi-même pencher en faveur de l’utilisation exceptionnelle des dons de l’Oracle pour cette affaire.

- Mais vous rendez-vous compte du danger que cette histoire nous fait prendre ?! , lança un homme de l’assemblée dont la tunique était bordée de liserés dorés et jaunes.

- Bien sûr professeur Hélius, mais avez-vous une autre solution ?, demanda calmement Pantonas.

Le professeur ouvrit la bouche mais la referma sans rien dire et se rassit, dents et poings serrés.

- Il faut être extrêmement vigilant, lança une jeune femme aux longs cheveux blonds, si nous donnons en majorité notre approbation nous devons être certains que cette affaire ne sera jamais dévoilée, l’Oracle devra être déplacé ailleurs et cette jeune personne devra jurer sur les lois des anciens.

Plusieurs personnes approuvèrent les dire de la jeune femme d’un signe de tête.

- Bien, dans ce cas procédons au vote.

Sur l’ensemble des personnes présentes, seuls le dénommé professeur Hélius et deux autres personnes se prononcèrent contre. Le directeur se leva de son siège, leva sa main droite et mis la gauche dans le dos. Toujours avec son air sévère et solennel il annonça :

- Moi, Pantonas Daubanier, directeur de cette académie, déclare que l’assemblée du conseil a officiellement voté dans sa majorité pour la transgression d’une loi sacrée de notre royaume, en permettant à la jeune personne du nom de Yse, humaine venue de l’autre côté, à se rendre auprès de l’Oracle afin de déterminer son rôle au sein de notre monde, ainsi que d’avoir la ou les réponses que toute autre interrogation que sa requête principale pourrait engendrer. De plus, cette jeune personne sera tenue de jurer sur les lois des anciens, afin d’empêcher qu’elle puisse un jour divulguer quelque information que se fut au sujet de l’Oracle.

Cette grande déclaration faisait peu à peu prendre conscience à Yse qu’elle s’était fourrée dans un sacrée pétrin. Encore une fois, elle se demanda si elle ou Barrold avaient véritablement eu le choix. Alors que depuis qu’elle était dans ce monde tout paraissait aller à une allure d’escargot, la jeune fille trouva soudain que tout allait un peu vite.

Elle sortit de la pièce avec le libraire en ayant l’impression d’être sortie d’un conseil de discipline. Barrold lui proposa d’aller manger un morceau avant de regagner sa chambre. Yse ne mangea pas grand-chose tant ce qu’elle venait de vivre avait été source de stresse et de peur mélangée. Elle demanda tout de même à son compagnon de la raccompagner jusqu’à sa chambre, sachant pertinemment qu’elle ne saurait pas se repérer toute seule. Arrivée devant sa porte, Yse comprit qu’elle allait dormir seule pour la première fois depuis un long moment, mais cette idée la terrifia plus qu’autre chose.

- Yse ? , lança la voix du jeune homme qui voyait que son amie ne bougeait pas d’un pouce.

- Je… je crois que j’ai un peu peur, articula cette dernière sans oser regarder son guide.

- Peur ? Mais peur de quoi ?

- Je ne sais pas, je tremble sans raison, j’ai l’impression que… que si je me retrouve vraiment seule tout va disparaître.

Des images de son arrivée dans ce monde lui revinrent à l’esprit. Ces champs à perte de vue, la faim qui tordait son estomac, cette peur ressentie de ne pas savoir quoi faire ni ou aller, sa montre cassée… La main chaude du garçon se posa sur son front. Ce contact, à la fois si simple et si petit remplit le corps de la jeune fille d’une douce chaleur rassurante. Elle ferma les yeux quelques instants et savoura ces quelques secondes de sérénité.

- Tu n’as pas de fièvre, dit Barrold qui avait son autre main sur son front, tu dois être vraiment fatiguée, ne traînes pas et vas dormir.

- Merci Barrold, dit la jeune fille doucement.

Mais à peine son ami avait-il tourné les talons qu’un sentiment de solitude et d’insécurité se mit de nouveau à tordre les tripes de la pauvre enfant. Elle ferma sa porte à double tours et s’enfonça dans les draps sans prendre la peine de se déshabiller.

-

Des images reviennent, d’abord ses amis Lucie et Félix, puis le lycée, la cantine et les salles de classe. Les fenêtres qui la font s’échapper quelques heures dans ces mondes qu’elle aime s’inventer, les professeurs qui lisent leur cours avec un ton lasse et monotone. Puis le paysage se met à bouger, tout s’efface, le noir envahit tout. Yse ne parvient plus à respirer, elle tente de tendre la main devant elle mais ne parvint pas à bouger le petit doigt. Elle veut hurler de toutes ses forces, aucun son ne sort, la panique, la peur. Enfin, les ténèbres se dissipent, comme la mer après la tempête, le calme revient et lentement la jeune fille peut de nouveau respirer. Les battements de son cœur sont si forts qu’elle les entend résonner dans sa tête. La voilà arrivée dans une clairière éclairée d’une lune ronde et claire. Une silhouette se tient devant elle, petite et bleue, elle brille comme l’éclat de la lune.

- Helfyna ? , demande Yse.

- Yse, Yse ! , crie de joie la petite créature avant de courir vers elle.

Instinctivement Yse pose ses genoux au sol avant d’accueillir son amie dans ses bras.

- Moi avoir eu si peur pour Yse ! Toi perdue dans la faille, moi presque pas réussi à te ramener !

- Me ramener ? De quoi tu parles ?

- Toi dois aller voir Oracle, continue le Leïlor en plongeant ses grands yeux jaunes félins dans ceux de la jeune fille.

- Oui je sais, je dois le voir dans quelques jours, le temps que tout soit mis en place…

- Non ! Toi dois voir Oracle maintenant ! Lui doit te voir seul à seul ! Seulement à toi dire la vérité !

- La vérité ? Quelle vérité, de quoi tu parles ?

- Vas maintenant, Yse, dit le petit être en commençant à s’éloigner, vas , Oracle t’attends au cœur des sous-sols de académie.

- Attends Helfyna ! Je ne sais pas comment faire pour arriver jusqu’à lui !

Yse hurle tant son amie lui paraît soudain bien loin.

- Vas Yse, entend-elle alors au plus profond d’elle-même ; vas, la vérité est cruelle, mais le destin est toujours juste.

Yse se réveille en sueur. Dehors l’éclat de la lune berçe la capitale endormie. Le ciel est dégagé, mais la tempête gronde par delà les frontières, elle le sent. Encore déboussolée par le rêve qu’elle vient de faire, Yse s’apprête à se lever mais se fige instantanément. Sa porte est entrouverte, pourtant, la jeune étrangère se souvient l’avoir verrouillée à double tours.
Elle se leva lentement , sa couverture tombant au sol, elle n’y prêta pas attention. Son regard restait figé sur cette porte ouverte, un courant d’air la fesant grincer. Puis soudain un écho, un murmure que le vent lui fait parvenir.

« Viens, viens à moi. »

Yse se décide à quitter sa chambre. En haut de l’escalier, un bougeoir allumé a été déposé, trop gros pour être une coïncidence. Yse le prend néanmoins, seul moyen de voir où elle peut mettre les pieds. Alors, comme à son arrivée, une fois de plus Yse marche dans la direction du courant d’air. Elle descend chaque marche avec précaution, se tient à la rampe d’une main, la bougie dans l’autre. Ses bottes claquent légèrement le pavé, mais sans faire trop de bruit. Ainsi, Yse marche, descend un, puis deux, puis cinq ou six escaliers. Bientôt elle ne reconnaît plus les murs de l’académie. Les couloirs sont plus étroits, la pierres plus grossière et plus humide. Touchant la pierre sombre et froide de ses doigts, elle se croit revenue dans cette grotte à son arrivée, la bougie n’éclairant que partiellement son chemin, Yse se concentre là où elle met les pieds. Soudain, levant la tête, la petite aventurière aperçoit que des portes sont disposées de part et d’autres du couloir. Curieuse de nature, elle aurait bien jeté un œil si l’endroit n’avait pas semblé si inhospitalier.
Le courant d’air continuait de l’emmener toujours plus loin dans ce tunnel où le plafond se rapprochait dangereusement de sa tête. Enfin, après de longues minutes à errer dans ces interminables couloirs, Yse s’arrête devant une porte qui ressemble à si méprendre à celle de sa chambre. Elle pose délicatement sa main sur le bois vieilli et détérioré, le battant s’ouvre en grinçant bruyamment. Des échos de chuchotis de voix traversent la pièce, Yse ne parvient pourtant pas à comprendre ce qu’ils disent. Elle se fige de stupeur en voyant ce qui trône au milieu de la pièce. Comprenant sans peine à qui, ou plutôt à quoi elle avait à faire, l’adolescente regardait avec fascination l’immense tourbillon bleu, englobé d’une sphère transparente décorée de tenants en métal doré, dessinés en arabesques tout autour de du globe flottant paisiblement.
- Le chaos… , tonna une voix sombre et caverneuse qui semblait provenir du tourbillon.

Yse s’approcha enfin, toujours sa bougie à la main.

- Vous êtes… vous êtes l’Oracle n’est-ce pas ?

- Je suis ce que tu vois, lança à nouveau la voix, je vois, j’entends mais jamais ne demeure.

- Oracle ! Dites-moi comment va Helfyna s’il vous plait !, demanda précipitamment la jeune fille en s’avança vers la sphère.

- Tu causeras la chute, continua l’Oracle, tu causeras la mort, héros tu n’es pas, héros jamais tu ne seras.

Yse se figea devant le-dit Oracle. Ce n’est pas ce qu’elle voulait, ce n’est pas ce qu’elle désirait entendre, par dessus tout elle aurait aimé entendre qu’elle pouvait le devenir.

- Mais… mais pourquoi ? Qui est cet élu ? Pourquoi suis-je ici ? Je vous en supplie ! Répondez-moi !;
Dit-elle en posant les mains sur le verre du globe, sa voix s’était faite suppliante.

- Pourquoi sommes-nous là et pas ailleurs ? , demanda l’Oracle, pourquoi y a-t-il des forts et pourquoi y a-t-il des faibles ? Les questions n’ont pas pour but d’avoir de réponses, seulement de pousser les esprits à les imaginer.

- Mais il y a forcément des réponses ! Sinon les questions n’existeraient pas !

Un ricanement grave et glaçant retentit dans la pièce.

- Les réponses ne changent pas le destin, elles ne font que le précipiter. Enfant tu es, enfant tu resteras.

- Je ne suis pas une enfant ! Toute ma vie on m’a traité d’enfant, de faible, toute ma vie j’ai voulu me prouver que je pouvais être autre chose que ce que l’on attendait de moi !

- Et pourtant… tu es ce que tu ne voudrais pas être, la force ne réside pas dans l’épreuve, la force n’est pas un instrument, ce que tu es ne changera pas ce que tu penses.

- Ce que vous dites n’a aucun sens, soupira Yse dont les yeux s’embuaient de larmes. Fatiguée, blessée dans son amour propre, la jeune fille s’assit en s’adossant contre la sphère, bercée par la lumière du tourbillon en son centre.

- Oracle… oh Oracle, pourquoi je ne peux pas être cet élu ? Pourquoi je ne peux pas être un héros ?

- Car élu tu n’es pas, même avec force ou magie tu ne saurais être quelqu’un que tu n’es pas.

- Alors, est-ce qu’il existe un moyen de partir d’ici ? Si je ne peux rien faire pour aider ce monde, comment retourner chez moi ?

- Si tu voulais véritablement rentrer, tu le serais déjà. Petite âme venue du monde miroir, tu crois que l’être ne peut rien faire si il n’est pas choisi par celui qui l’a créé.

- Tu me réponds par énigme Oracle, qu’est-ce je dois comprendre ?

- Tu sèmeras le chaos dans ce monde, l’ordre sombrera dans le désordre, tout ne sera plus et tout renaîtra sous un jour nouveau.

- Si tu me dis que je suis à l’origine de la fin du monde, ce n’est pas vraiment rassurant.

- L’esprit humain comprend ce qu’il veut comprendre, la réflexion lui échappe comme l’air échappe au temps et pourtant ne peut vivre sans lui.

Yse soupira une fois de plus, non seulement l’Oracle ne répondait pas à ses questions, mais en plus de cela elle commençait vraiment à croire qu’elle ne pourrait jamais rentrer chez elle. La jeune fille se tapotait les fesses en se levant et reprit sa bougie, se préparant à repartir dans sa chambre.

- Bon eh bien, monsieur l’Oracle, je ne sais pas pourquoi vous vouliez me voir ni pourquoi Helfyna m’a demandé de venir ici mais, vu que je suis décidément trop bête pour comprendre, je retourne me coucher.

L’Oracle ne lui répondit pas. Yse jeta un dernier coup au tourbillon avant de se diriger vers la porte.

- … Il n’y a que l’Homme pour croire qu’il lui est impossible de faire quelque chose.

Ce fut plus fort qu’elle, la colère qui lui piquait les narines finit par la faire exploser, sa fatigue n’aidant pas.

- Ça suffit ! Y en a marre ! D’abord vous me dites que je vais mettre le monde en l’air, puis je ne suis pas l’élue, puis je suis une gamine, puis je ne peux rien faire et au final vous sortez un charabia que même un informaticien ne parviendrait pas à décoder ! Oh et puis vous savez quoi, je n’ai jamais eu besoin de l’aide d’un Oracle pour savoir ce que je devais faire dans la vie, je me passerai donc de vos services ! , s’énerva Yse.

Cette fois, la voix éclata d’un gros rire gras qui fit trembler les murs de tout le bâtiment et fit légèrement perdre l’équilibre à la jeune fille. Sa colère redescendit aussi tôt, remplacée par un sentiment de peur mêlé d’incompréhension.

- Écoute, écoute bien petite, reprit enfin la voix sur son ton calme, si tu veux changer le monde, changer le monde tu peux. Mais tout a un prix, même la vie, et même si dans la mort elle demeure les esprits eux la pleurent.

- Je ne comprends toujours pas vous savez.

- Le temps sera meilleur oracle que moi, il ne parle pas mais il sait. Tout est un cycle, enfant, tout se termine et tout recommence. Si tu ne peux pas être ce que tu veux être, en revanche tu peux agir. La vérité est cruelle, mais le destin est toujours juste.

Cette dernière phrase fit tiquer l’esprit de l’adolescente, elle avait entendu cette phrase, mais où ? Elle lui semblait familière. Yse réfléchissait lorsqu’un bruit étrange résonna au dessus de sa tête.

- Vite, écoute, lança soudain l’Oracle d’une voix chuchotante. Le monde est instable, de grands événements sont à venir. Ce monde est condamné, tu ne peux rien pour lui.

- Comment ? Mais vous disiez…

- Pars, si on te trouve ici le fil sera brisé, ne t’inquiètes pas, la voix de l’Oracle se fit soudain aussi douce qu’une caresse ; si tu sais écouter, le vent t’apportera toujours la réponse. Allez vas, nous nous reverrons.

Sur ces derniers mots, le tourbillon disparu en une fraction de secondes comme englouti par le vide. Déconcertée mais tous ses sens désormais en alertes, Yse regagna la porte et se mit à marcher, laissant ses pieds la guider car sa tête était plongée dans ses pensées.



 Fin du Chapitre 15




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