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jeudi 14 mars 2019

PSYCAUSE - chapitre 2

  PSYCAUSE

CHAPITRE 2


BESOIN D'AIDE

16h15. Ça fait une semaine. Déjà une semaine. Je le sais parce que partout sur les télés des lieux publique et les journaux il y a les dates. Je les compte, voulant savoir avec précision depuis quand je suis née et depuis quand mon calvaire a commencé. Je ne saurai dire si j'ai fait le bon choix, j'ai fait un choix. J'ai su dès l'instant où je suis rentrée dans cet hôpital que jamais plus je n'aurai de vie normale. Je ne m'attendais pas à ça mais je m'en doutais un peu. Elle est là, toujours là mais elle se tait, contemple avec délectation sans doute ce que je vis. Jamais ne porte un regard de jugement mais je sais qu'elle me voit autant que je la vois. Sur ce point je ne suis pas folle quand bien même les autres ne peuvent pas la voir. Je dois me battre même si j'ignore pourquoi. Une semaine, c'est si énorme et si peu à la fois. Je n'ai pas recroisé cet homme bizarre depuis mon passage au parc. Mais j'ai peur, continuellement je regarde autour de moi avec méfiance, j'étudie avec minutie ce qui m'entoure. Tous les jours je trouve un nouvel endroit pour passer la nuit. Il y a peu j'ai trouvé des chaussures dans une benne à ordures pratiquement neuves. Des chaussures d'hommes bien trop grande pour moi mais je ne m'en plains pas. J'ai déchiré le bas de mon pantalon pour faire des bandages autour de mes pieds, ça me sert de chaussettes. Hier aussi j'ai réussi à voler sur un étendoir un t-shirt trop grand là encore, mon ancien haut commençant sérieusement à puer. Je le garde quand même avec moi pour le soir. Une semaine… combien de temps encore ? Je commence à peine à trouver mes marques mais bientôt il me faudra partir, essayer de survivre ailleurs. Je n'ai pas d'argent, pas de papiers, pas de famille. Mais depuis que j'ai trouvé ces chaussures le ciel semble avoir été clément avec moi. Même perdue et sans rien j'ai réussi à survivre aux prix de gros efforts. Je suis maigre et affamée, sale et fatiguée mais je suis vivante. Malgré tout mon rhume persiste, peut-être s'est-il aggravé. Je ne le saurai que lorsqu'il sera trop tard. Quand je m'arrête devant un reflet le temps ralentit. Je la vois, parfois elle me sourit parfois pas. Elle reste muette et elle m'est d'un étrange réconfort. Je touche du bout des doigts ce reflet si semblable à moi et pourtant si différent. Le temps n'existe plus. J'ai l'impression qu'elle cherche à me dire quelque chose, et pourtant jamais ne prononce le moindre mot. Plus depuis cette seule et unique fois.

Le soir tombe rapidement sur la ville, les lumières s'allument maintenant la cité en éveil. C'est beau une ville illuminée si on ne tient pas compte du ciel si exempt d'étoiles planant au dessus de nos têtes. Je me balade le long des rues animées, une ambiance chaleureuse y règne. Les enseignes se succèdent les unes après les autres, mêlant tour à tour les couleurs de l'arc en ciel. Le temps se fige. Seule et folle, mais si bien tant qu'elle ne sait pas. Je voudrais que ces moments ne cessent jamais. Je vois des gens rires, des familles heureuses, même des gens seuls semblent aimer l'ambiance environnante. Moi et mon éternel carton y compris aussi. Les yeux rivés sur le sol j'aperçois soudain un petite tâche rouge. Je me baisse et ramasser un élastique à cheveux. Quelle chance ! J'en profite pour attacher les miens bien qu'ils ne ressemblent plus à grand-chose. Ils ont poussé même si ce n'est pas flagrant. Ma franche me tombe maintenant beaucoup sur les yeux, alors qu'au centre elle s'arrêtait pile au niveau de mes sourcils. C'est fou comme des cheveux peuvent pousser vite. Cinq minutes plus tard j'aperçois une église et me remémore avec surprise là scène qui c'était déroulée devant une semaine auparavant. Un peu nostalgique je m'assoies de nouveau sur les marches en pierres et profite du paysage. Une très légère brise passe dans les cheveux que je n'ai pas réussi à attacher les faisant timidement voler. Je ferme les yeux un instant et inspire avec calme et lenteur. Je me sens bien.

« Toujours en vie. »

Je pousse un cri de surprise, la voix vient de derrière. Je reconnais sans peine l'inconnu qui m'avait abordé dans le parc, arborant toujours sa tenue son bob et ces lunettes noirs. On pourrait presque croire qu'il ne s'est pas changé de la semaine. Moi qui croyait être un cas exceptionnel.

« Vous ! »

Je ne pouvais pas m'empêcher de le pointer du dois en me levant vers lui.

« Qu'est-ce vous me voulez encore ?! »

Il lâcha un soupir.

« On veut te voir. »

- C'est qui « on » ?

- Des gens.

- Oh et vous croyez qu'en me disant un truc comme ça je vais vous suivre bien gentiment ?

- J'ai bien vu la dernière fois que ce n'était pas si simple. (Il me lança un petit sourire) Malheureusement pour le moment je ne peux pas te renseigner sur l'identité des personnes qui veulent te rencontrer, saches simplement que nous ne sommes ni de l'hôpital ni du centre et que nous ne souhaitons aucunement t'enfermer dans une structure.

- C'était presque convaincant, mais je ne suis pas dupe. Peu importe qui vous êtes en fait quoi qu'il arrive, je ne vous suivrai pas !

L'homme soupira une fois de plus et sortit un sac en plastique avant de venir s'asseoir à coté de moi.

- Je parie que tu as faim, assieds-toi j'ai apporté des sandwichs.

Mon ventre gargouilla au mot sandwichs. Je tentais inutilement de cacher ma gêne.

- Vous pariez ou vous savez sale espion ?

Pour toute réponse le jeune inconnu se contenta de sourire et de prendre un des sandwichs dans le sac. J'étais toujours méfiante, mais j'avais trop faim pour partir.

- Je m'assois à une condition, vous n'essayez pas de me capturer pendant que je mange, ou je jure que vous ne serez plus un homme digne de ce nom dans la minute qui suit.

Il leva les bras, un morceau de sandwich dans la bouche.

- Churé.

Je m'assis avec méfiance et sortis le deuxième sandwich. Je mordais dedans avec faim. Je voulais sentir le goût du poulet avec sa sauce moutarde mais j'avais si faim qu'à peine j'avalais une bouchée qu'une autre se préparait à la suivre.

- Eh eh doucement !; intervint l'inconnu en tirant un peu sur mon repas ; on a tout le temps alors mange tranquillement.

- J'essaye, mais j'ai trop faim.

Je le regardais comme une petite fille qu'on venait de gronder pour avoir manger un bonbon sans permission. L'homme éclata d'un rire franc.

- Essaye quand même de ne pas t'étouffer en mangeant ; me dit-il en reprenant son sérieux.

Je reprenais mon activité malgré les cheveux qui me tombait de nouveau sur les yeux. Rien ne m'empêcherai de manger ce sandwich ! Cheveux ou pas. Je soufflais dessus, mais rien ne changeait. Je finis par me résigner. C'est alors que je vis une main se rapprocher de moi. Je m'écartais machinalement, la bouche encore pleine. Je vis un regard étrangement doux et tendre. L'inconnu avança encore sa main et vint placer la mèche de cheveux qui me gênait derrière l'oreille. Il me sourit.

- … Merchi ; dis-je en finissant ma bouchée.

Il tint parole et n'essaya pas une seule fois de me forcer à venir avec lui. Je trouvais cette attitude docile des plus louches mais je n'en disais évidemment rien. Je restais sur mes gardes comme un chat près à bondir au moindre mouvement suspect. Il froissa son sac plastique et le mit dans une des poches de sa veste.

- On va se balader ?

- Non.

- Pourquoi ?

- Pas confiance.

- Allez…

- Non.

- Tu veux pas te balader ?

- Pas avec vous.

Aïe. Il fit une moue boudeuse. Je ne voyais pas grand-chose de son visage à cause de ce bob et ces lunettes noires. J'avais envie de lui poser des tas de questions mais je sentais bien qu'il refuserait d'y répondre. J'étais peut-être trop méfiante, mais les récents événements de ma vie m'avaient appris qu'on ne peut faire confiance à personne, pas même ses proches.

- Dans ce cas tu veux discuter ?

- De quoi ?

- De toi.

- Pourquoi moi ? Moi je suis plutôt curieuse à votre sujet.

- Qu'est-ce que tu veux savoir ?

- Nom, Prénom, âge, date d'anniversaire, taille poids, hobby…

- Nom : Jorris ; Prénom : Marc ; âge : 29 ans ; anniversaire : 26 Octobre ; taille : 1m78 ; poids : 65kg ; hobby ? Heu… la musique, le sport, les animaux… bref des trucs bateaux.

- Vous bossez dans quoi ?

- Top secret.

- Comme c'est pratique.

- Tu le saurais si tu m'accompagnais.

- Je me demandais quand est-ce que le sujet reviendrait.

- J'ai besoin que tu viennes.

- Moi j'en ai pas besoin.

Il me regarda fixement l'air impassible. C'était une espèce de bras de fer, qui allait gagner personne ne le savait. C'était amusant, rafraîchissant même. Ça faisait bien longtemps que je ne m'étais pas autant amusée. Marc souffla bruyamment.

- Quelle tête de mule.

- Au moins ça nous fait un point en commun.

On se regarda une nouvelle fois, tentions de garder un air neutre mais mon sourire finit par me trahir. Depuis combien de temps n'avais-je pas souri si franchement ? Je me sentais étrangement bien, étrangement… vivante.
Marc sourit lui aussi, un sourire craquant avec des dents parfaitement alignées. Trop propre. Le silence revint s'installer entre nous. Toujours assis sur les marches de l'église, le froid se faisait cependant de plus en plus présent. Même avec deux épaisseurs de tissus je ne pouvais m'empêcher de trembler et de tousser, j'avais pris l'habitude.

- Ecoute je sais que tu ne me fais pas confiance, mais tu n'as aucun endroit où dormir pas vrai ?

- Bien sûr que si ! Sous le pont par exemple ou dans une impasse quelconque, sans compter que j'ai ma super couverture tout type de sols !; disais-je en montrant fièrement mon carton.

Marc ne rit pas, une blague de plus qui tombe à l'eau. Il me regardait fixement l'air grave.

- Je suis sérieux… tu es malade et squelettique! Combien de temps vas-tu rester comme ça ?

- Le temps qu'il faudra pour que je trouve une hygiène de vie à peu près normale.

Voyant que la conversation prenait un ton un peu trop sérieux je me levais et me préparait à partir :

- Merci pour le sandwich et cette conversation. Aurev…

- Attends !

Marc m'attrapa le bras avec fermeté, prise de panique je faisais un mouvement brusque pour me dégager, en vain. Il me tenait fermement le poignet.

- Je ne t'emmènerai pas si tu ne veux pas je te le jure n'aies pas peur.

- Tu oublies juste cette fois où tu m'as carrément porté de force !

- Tu t'écroulais par terre ! Écoute, c'est vrai que j'ai pas agi de manière très diplomate la dernière fois mais juste cette nuit acceptes que je t'héberge.

- Non !

Je me dégageais fermement. Voyant que je ne lui faisais absolument pas confiance Marc baissa la tête. Il avait l'air contrarié.

- Très bien.

Il tourna les talons et partit les mains dans les poches sans se retourner. Je restais seule comme une idiote avec mon carton sous le bras. C'était à la fois frustrant et rassurant. Le fait qu'il n'ait pas insisté me rassurait sur le fait qu'il ne cherchait pas par tous les moyens à me faire venir avec lui, mais d'un autre coté qu'il n'ait pas insisté était frustrant… en tant que femme. Puis je réalisais mon état. Sale, maigre, puante et malade. Un bon résumé. Je soupirais, j'avais loupé une chance de dormir au chaud mais le danger était grand, et je ne me sentais pas encore prête à prendre ce genre de risque. Je m'enfonçais dans les rues étroites du quartier dans la direction opposé de Marc.

Cette nuit il fit vraiment froid. Malgré mon brave carton le froid pénétrant attaquait ma peau en passant sous mes vêtements. Je claquais des dents. Le vent était fort et la pluie menaçait de tomber. Quelle idiote vraiment ! Mais il était trop tard pour faire marche arrière. Moins d'une heure plus tard je décidais de changer d'emplacement, celui-ci étant définitivement trop exposé. Je parcourais les rues silencieuses avec résignation. Bientôt j'aperçus la petite église et de nouveau je sentis mes larmes coulées. Je tournais en rond. J'avais froid, et soif. Je m'assis sur les marches, et attendais avec douleur une potentielle fin. Je toussais à en cracher mes poumons. Le vent couvrait mes sanglots. Recroquevillée sur moi-même je tenais et serrais aussi fort que possible mon carton contre moi. J'étais épuisée et résignée.
Il me fallu dix bonnes secondes avant de réaliser, un quart plus tard que quelqu'un se tenait devant moi.

- «  Marc…

- Je savais que je te trouverai ici.

- Menteur… (Je toussais fortement)… avoue que tu m'espionnes.

- Je n'en ai pas eu besoin, appelle ça de l'instinct.

Lentement je sentis qu'on me soulevait.

- Non !

- Je t’emmène chez moi que tu le veuilles ou non, tu partiras demain matin si tu le souhaites mais je refuse de te laisser dormir ici dans ce froid.

La voix de Marc était ferme… et merveilleusement rassurante. Je ne souhaitais pas me débattre, pas plus que de me défaire de son emprise. Le corps de Marc était chaud, j'y enfouis mon visage et me tus tout le long du trajet.
Je dormais à moitié lorsque Marc me déposa sur le lit. Je fus accueillis par une couette moelleuse et chaude.

- Tu es gelée…

- J'ai l'habitude.. ; répondais-je en dodelinant.

Marc partit quelques instants. J'entendais un bruit d'eau provenant d'une pièce voisine, mais la fatigue m'empêchait de détailler l'environnement. Le jeune homme revint quelques minutes plus tard et je repris dans ses bras pour m'emmener dans la salle de bain.

- Il faut que tu te réchauffes sinon tu vas vraiment y laisser la peau.

Intérieurement je m'en fichais un peu. J'étais déjà morte dans un sens. Trop faible pour protester je me laissais plonger dans l'eau légèrement chaude. Marc avait pris soin de ne pas faire couler une eau trop chaude, ce qui rendait l'immersion des plus agréables. L'eau passait à travers mes vêtements et réchauffait peu à peu mon pauvre corps gelé. C'était comme les bras d'une mère qui vous couvre d'amour après une lourde épreuve, malgré moi, je me remémorais ma mère me prenant dans les bras et une larme coula de ma joue. Je pleurais trop ces derniers temps, sans doute pour compenser toutes ces années de mort intérieure. Dix minutes après Marc vint me chercher. Je ne dormais pas tout à fait et sentit lorsqu'il commença à m'ôter mon haut. J'aurais dû me sentir gêner, honteuse. Rien, le néant. J'étais trop fatiguée pour avoir honte. De toute façon je n'attendais rien de particulier. Après m'avoir débarrassé de mes vieux vêtements trempés Marc enroula une longue serviette autour de mon corps et entreprit de me sécher un peu les cheveux. Après quoi il me fit enfiler un long t-shirt qui devait lui appartenir et me glissa tendrement dans le lit moelleux. Je dormi comme un loir. Le matin fut rude, surtout lorsqu'on vient de passer une nuit aussi agréable. Je me sentais bien, le lit était doux, la couette moelleuse à souhait et une douce chaleur m’étreignait… Marc. Marc ? Je mis un court instant à réaliser qu'il dormait paisiblement à mes cotés, me tenant dans les bras. Enfin débarrassé de cet éternel bob et de ses lunettes noires, je taisais mon cri de surprise pour étudier méthodiquement son visage. Et quel visage ! Encadré par une touffe de cheveux blonds assez long pour un homme, il a les traits réguliers et des cils plutôt longs. Un nez bien fait droit et long, ses lèvres elles s'étirait finement au dessus de son menton bien rasé. Des sourcils un peu broussailleux eux aussi blonds. Je me perdais dans cet contemplation matinale quand je vis ses paupières se lever pour faire place de envoûtantes pupilles vertes. Mama, si on m'avait dit qu'un jour je me réveillerai dans le lit d'un mec aussi mignon. Mais très vite un détail me revint à l'esprit. Cet apollon était aussi, accessoirement, le même qui avait essayé de ma kidnapper quelques jours plus tôt. Un détail. Croisant mon regard Marc me sourit gentiment et passa la main dans mes cheveux. Nos visages étaient proches l'un de l'autre, assez proches pour que s'il baissait la tête nos lèvres se touchent.

- Salut, comment tu te sens ce matin ?; la question avait été posée le plus simplement du monde.

- Bien merci… mais pourquoi j'ai dormi dans tes bras ?

- Cette nuit je voulais dormir sur le canapé mais tu claquais des dents et tu tremblais. J'ai fini par avoir pitié de toi.

- Oh… eh bien merci… radiateur.

Je lui souris de manière friponne. Un sourire qu'il me rendit à moitié, caressant toujours ma chevelure sombre. Puis sans un mot il me prit dans ses bras et me câlina gentiment.

- Tu sais hier j'ai eu peur. Quand je t'ai vu si faible j'ai vraiment cru que tu allais me claquer entre les doigts.

- Et si ça avait été le cas ?

Il me serra un peu plus fort.

- Je ne sais pas ce que j'aurai fait. ; Il m'avoua ça avec une telle honnêteté et sincérité que je ne sus pas quoi répondre.
Je me demandais si dans sa vie il n'avait pas déjà perdu quelqu'un dans des circonstances similaires. Je lui rendis son câlin, plus par réflexe que par réelle envie. Il avait les bras et la chaleur d'une mère, un frère et un ami. Cette étrange impression de le connaître depuis toujours, d’interagir de manière si naturelle alors que nous étions quasiment des inconnus l’un pour l’autre pas plus tard que la veille. Je plongeais ma tête dans son torse et profitais encore un peu de cet instant de calme. Nous savions tous les deux que la situation allait se compliquer. Mais nous ignorions à quel point. Il m'embrassa sur le front.

- Tu as faim tu veux manger ?; demanda-t-il en se levant.

- Tu connais déjà la réponse…

Il sourit et se dirigea dans le fond de la pièce, vers le coin cuisine. Pendant qu'il préparait le petit déjeuner j'en profitais pour détailler les lieux. Un endroit simple, propre. Une grand pièce principale, sur la droite de la porte d'entrée ce trouvait le coin cuisine en open space avec le reste de la pièce. Dans le fond toujours sur la droite, en face du lit un coin salon avec deux canapés formant un angle et une télé écran plat. Sur le coté la porte menant à la salle de bain. Le coin chambre était délimité par un parquet posé en losange au niveau du lit, ce dernier accompagné de tables de nuit blanches de chaque coté. Pour les couleurs là encore du sobre : blanc, noir, gris marron et de temps temps quelques touches de rouges surtout au niveau de la cuisine. Un bel appartement en somme.

- Mademoiselle est servie !

Lança Marc du fond de la pièce. Sans attendre je me levais et me dirigeais d'un pas rapide vers les tabourets. Assis face à face nous mangions comme de rois tout en discutant de tout et de rien le tout accompagné d'une bonne tranche de rires. Après le petit déjeuner Marc m'autorisa à utiliser la salle de bain à ma guise. Je repris un bain, un vrai cette fois-ci et pris le temps de bien me décrasser. Une fois sortie je renfilais le t-shirt que Marc m'avait prêté ne sachant pas ou il avait mis mes anciens vêtements. Je prenais soudain totalement conscience de la scène qui s'était déroulée la veille dans cette même salle de bain. Le rose me monta aux joues. Je sortis timidement, les cheveux encore mouillés, le t-shirt tombant de mon épaule gauche et me couvrant à peine plus de la moitié de mes cuisses.

- Marc… ; appelai-je timidement.

- Oui ? ; répondit celui-ci alors qu'il refaisait le lit me tournant le dos.

- Qu'est-ce que tu as fait de mes anciens vêtements ? Je ne peux pas rester avec ton t-shirt toute la journée.

Il s'immobilisa, l'oreiller à la main.

- Je les ai jeté.

- Quoi ?!

Il se tourna lentement vers moi et fixement si intensément que mon cœur rata un battement. Il s'approcha d'un pas lent, laissant l'oreiller tomber sur le lit. Arrivé à ma hauteur, le regard fiévreux il poursuivit.

- Ils empestaient, étaient sales et trop grand pour toi de toute façon.

Sa voix grave faisait vibrer chaque partie de ma peau.

- M… Mais je n'ai que ça.

Il fixait mon épaule dénudée. Il se pencha et m'embrassa dans à la naissance du cou. Ses mains agrippèrent mes hanches et la pression de ses lèvres sur ma peau s'intensifia. Des frissons me parcouraient le corps. Je posais timidement mes mains sur son torse sans envie de le repousser. Ce n'était pas de l'amour, mais une simple réaction naturelle du corps. Cela faisait si longtemps, ne éternité même, que je n’avais pas eu de contact si intense avec une personne. Ses lèvres embrassèrent mon cou jusqu'au creux de mon oreille. Il murmurait

- Tu sens bon.

- M… Marc… ; ma voix était hésitante.

Il me serra fort contre lui. Encore une fois je savais, ce n'était pas de l'amour, ce n'était pas comme avec Adrien. Mais je m'en fichais, il avait envie de moi. Simple pulsion sexuelle, je le remerciais déjà d'avoir réussi à garder son sang froid alors qu'il m'avait déshabillée puis rhabillée. Je savais aussi qu'il se retenait, qu'il attendait de voir si il avait ma permission. Ça le rendait vraiment irrésistible. Je pris sa tête dans le creux de mes mains, nos regards se croisaient, s'entendaient. Finalement nous nous sommes embrassés sans gêne et sans honte. Il me transporta sans rompre le lien et nous fîmes l'amour. Encore une fois je me sentais vivre depuis si longtemps, c'était la première fois que je me laissais aller avec un homme que je ne connaissais pas et envers lequel je n'avais pas de sentiment amoureux. C'était grisant de dépasser ses propres interdits. Le corps de Marc pesait contre le mien, nous étions ivres mais ivres de passion presque bestiale. Nous l'avons fait jusqu'à ce que nos corps cris grâce et que nous nous endormîmes de fatigue. Lui aussi avait dû mourir une première fois. Pour moi ce n'était qu'une expérience d'une vie nouvelle, je comprenais ce besoin irrépressible de sexe et en ce point Marc était un amant idéal. Bien bâtit on sentait qu'il n'en était pas à son coup d'essai. Je me réveillais dans ses bras enroulés autour de moi et me sentais étrangement en sécurité.

Je passais une nuit de plus chez lui, nous n'étions pas sorti de la journée. Désormais c'est naturellement que je sentais son corps nu peser contre le mien. Je me tournais pour le prendre dans mes bras et le serrer contre moi. Il me rendit mon étreinte avec autant de force et de passion. On sonna à la porte cinq minutes après. Avec un grognement Marc sortit du lit et enfila un vieux t-shirt et un jogging. Je me redressais sur mes coudes pour tenter de voir qui pouvait venir à une heure pareille. A ma grande surprise Marc laissa son impromptu invité rentrer sans que j'ai eu le temps d'enfiler quoique se soit. Pour toute défense je me drapais dans la couette. Un homme aussi grand que Marc s'arrêta aux pieds du lit et commença à me dévisager d'un air méprisant. Lui aussi vêtu de noir, faut croire que c'est une habitude ici. A l'inverse de Marc ce dernier avait des cheveux couleur ébènes, et de yeux noir de jais hypnotisant. Happée dans ce regard si profond je perdais peu à peu conscience du monde qui m'entourait. J'aurai pu m'y noyer si je n'avais pas vu une lueur si méprisante y briller. L'inconnu tourna la tête vers Marc visiblement agacé.

- C'est une manie pour toi de te taper tout ce que tu récupères hein ?

- Dis pas de connerie.


Ils devaient avoir le même âge, à un an près. Du moins c'est l'impression qu'ils donnaient. Le voyant désormais de profile j'apercevais un visage aux traits doux, un nez légèrement retroussé, des cils et des sourcils noirs, un menton assez court. Sa peau était plus bronzé que celle de Marc et une petite boucle d'oreille brillait à son oreille droite. Ses cheveux étaient un peu plus courts que ceux de Marc et pas moins ébouriffés. Il avait une aura électrique.

- Virgile veut la voir.

- A cette heure ?

- Tu le connais, pour lui « l'heure » est un concept assez flou.

- Elle ne veut pas venir.

- Par contre elle n'a pas dit non pour ton lit.

- La ferme Shay ! C'est moi qui l'ai amené de force, elle ne voulait pas venir et je lui ai dis qu'elle pourrait repartir quand elle se sentirait mieux.

- Joue pas aux cons Marc ! Virgile a besoin d'elle !

Visiblement peu perturbée par ma présence, les deux jeunes coqs continuaient un débat inutile. La colère finit par me piquer les narines.

- Eh vous deux je peux parler en mon nom !

Les deux blancs becs se turent et me regardèrent surpris.

Je me levais, prenant soin de garder la couette bien serrée contre moi et me plantait devant le dénommé Shay.

- Vous ! ; dis-je en pointant du doigt ; vous en avez du culot ! Je ne suis pas une « chose » d'accord ? (je me tournais vers Marc) et toi ! Je peux parler pour moi. (je me tournai de nouveau vers Shay). Je ne sais pas qui vous êtes ou pour qui vous travaillez et ça ne m'intéresse pas. Alors arrêtez de nous bassiner !

Shay retint visiblement de me hurler dessus. Le beau garçon n'a pas vraiment l'habitude qu'on le remette à sa place. Il serra les poings et les desserra.

- Donc si j'ai bien compris Marc ne t'as rien dit.

- Je suppose que non et à vrai dire il a bien fait.

- Donc tu ignores pourquoi nous avons besoin de toi.

- Tant que je n'ai pas besoin de vous…

La scène semblait beaucoup amuser Marc qui retenait une furieuse envie d'éclater de rire.

- Marc ne ris pas trop, quand j'aurai fait mon rapport à Virgile tu vas passer un sale quart d'heure.

La remarque fit mouche.

- Shay tu ne vas pas… tu ne vas pas oser ?

- Oser apprendre à ton supérieur que tu te tapes ses sujets au lieu de venir bosser ? Je vais me gêner…

- Shay je t'en supplie de fais pas ça !

- Lâche moi le bras !

La scène avait pris un tournant un peu inattendu. Je regardais les deux compères faire mumuse ensemble et pensais en toute sincérité qu'ils auraient pu être des frères. Soudain tout devint très lointain, un vertige me fit me rasseoir sur lit. Ma tête tanguait et tout devenait flou. Des images très furtives. Ce n'était que le début.

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