Le Monde de Graha - Yse chap.6

Le Monde de Graha

Volume 1

« C'est en marchant sur les pavés ensanglantés qu'il réalisera que ce monde est condamné, et c'est alors qu'un choix s'imposera à lui. Sa décision sera irrévocable et les dieux eux-même ne pourront aller à l'encontre de sa décision. » - Parole de l'Oracle

Chapitre 6 : Sans repère

Après quelques minutes de réflexion et d'incompréhension totales, Yse laissa cette histoire de côté et se mit à la découverte de la rue principale qui s'étendait devant elle. La jeune fille s'attarda sur l'aspect de la cité, dévorant des yeux l'architecture originale des maisons qui se succédaient aux abords du sentier couvert de dalles blanches. Les foyers paraissaient petits et leur toits vu d'en bas brillaient de toutes les couleurs. La ville était très animée et plusieurs fois Yse se surprit à réaliser à quel point les rues même les plus petites étaient belles et propre. Rien à voir avec son quartier où les déchets encombraient le passage et où les chewing-gums collés au sol formaient d'horribles tâches sur le béton. La jeune fille s'imagina soudain être dans l'un de ses innombrables romans qu'elle avait pour habitude de dévorer pendant son temps libre tant cette cité ressemblait à celles qui étaient décrites dans ces récits. Elle arriva bientôt sur une grande place où en son centre étaient installées de manière circulaire de petites fontaines couleur ivoire. L'eau qui en jaillissait était si claire, si brillante et cristalline qu'elle en faisait mal yeux. La jeune fille remarqua en observant les alentours que certaines bâtisses étaient différentes des autres, en y regardant bien elle vit que des pancartes y étaient accrochées et elle réalisa qu'il s'agissait de boutiques. Il y avait de tout ! Des simples commerces de vêtements et de nourriture aux armureries et boutiques d'antiquaire. A un moment Yse aperçue une librairie qui portait comme nom d'enseigne « Livres et apprentissage de magie » ; de magie ! Ces derniers mots frappèrent l'esprit de la jeune lycéenne, où diable était-elle tombée ? Aucun magasin de chez elle ne portait de nom aussi farfelu.

Yse ne savait plus quoi penser, tout l'intriguait. Cette ville aux allures de contes pour enfants, ces gardes de plus de deux mètres de haut, cette personne qui l'avait aidé puis disparue et… Le ventre de la jeune fille émit un grognement sonore.

Yse avait été si absorbée et perturbée par tout ce qui l'entourait qu'elle en avait oublié son estomac. Elle réalisa alors qu'elle mourait littéralement de faim. Pendant un instant la jeune fille pensa se diriger vers l'une des auberges qui bordaient la place où elle se trouvait mais se souvint très vite que ses poches ne contenaient pas assez d'argent pour se payer un vrai repas. Après un soupir de résignation Yse décida d'aller voir les étalages de nourritures dans une petite rue adjacente. Après avoir fait le tour de ses poches le verdict tomba : trois euros en pièces de un et une montre cassée en argent, la négociation allait être rude. La petite étrangère regarda longuement les différents étalages contenant d'étranges produits. La nourriture disposée ressemblait à des espèces de fruits exotiques, à moins que ce ne fut des légumes mutants bourrés d'OGM. Cependant malgré leur apparences peu ragoûtante la plupart des aliments paraissaient comestibles et de toute façon Yse avait trop faim pour faire la fine bouche. Le prix n'étant pas affiché la jeune fille prit un article au hasard, un met de couleurs jaune bleu pâle avec une forme de croissant un peu tordu, puis se dirigea vers le vieil homme penché sur un journal assit sous le auvent.

- « Bon… bonjour, excusez-moi combien ça coûte ?, demanda Yse.

- Quatre crorns et cinq pilas, grogna le marchand en jetant à peine un bref coup d’œil par dessus sa lecture.

- Heu… vous acceptez les euros ? Dit la pauvre fille déconcertée

- On accepte rien du tout ! Soit vous payez sois vous partez ! Répondit le vieillard agacé.

Yse poussa un soupir discret et reposa ce qui aurait pu être son repas. Démoralisée mais surtout mourant de faim la lycéenne retourna sur la place et s'assit sur le bord d'une des fontaines. Elle se tourna légèrement et contempla l'eau scintillante qui coulait le long de l'édifice en se demandant si elle était potable. Finissant finalement par céder à la tentation Yse se pencha, tint ses cheveux en arrière et trempa ses lèvres dans le liquide transparent. La fraîcheur et pureté de l'eau étaient telles que deux gorgées suffirent pour désaltérer la jeune fille. La douceur du nectar encore présente dans sa gorge, Yse se mit à faire le point sur sa situation quelque peu désespérée.

Elle se trouvait quelque part où tout et tout le monde lui était étranger, sans refuge ni repère pour se diriger, le tout avec trois euros en poche dans une ville où la monnaie était le crorn et le pilas. Un grognement de son estomac lui rappela qu'en plus d'être totalement perdue elle mourait de faim. La jeune fille ferma les yeux et se concentra sur un moyen de se sortir de cette situation. Depuis combien de temps n'avait-elle rien avalé ? Trop longtemps à en juger par le bruit que faisait son estomac. Yse baissa la tête, dépitée, les bras en croix sur ses genoux.

- Eh bien, on peut dire que les voyages ne te réussissent pas ! , lança soudain une voix masculine. Tu as une mine malade petite.

Yse releva brusquement la tête, l'étonnement se lisant clairement dans ses yeux. Devant elle se tenait un jeune homme les mains sur les hanches au visage charmant et un regard vert pétillant, un sourire fendait son minois avec un coin de la bouche légèrement plus relevé que l'autre. Sa carrure était fine mais on devinait une musculature bien entretenue sous le fin tissu de ses vêtements.

- Qui êtes-vous ? Questionna la jeune fille méfiante.

- Ah c'est vrai que tu dois avoir du mal à me reconnaître sous cette forme, répondit le jeune homme en prenant un air un peu désolé.

Yse eut un temps d'incompréhension ; « Sous cette forme ? Qu'est-ce qu'il veut dire  ? », se demanda-t-elle. Ils échangèrent un regard et l'inconnu comprit qu'elle ne comprenait pas.

- Tu me remets pas hein ? Je savais que j'aurai dû te botter les fesses directement au lieu de te prendre comme moucheron. 
Il sourit de nouveau.

Pendant une fraction de seconde les derniers mots du jeune inconnu résonnèrent dans la tête de la jeune fille puis soudain ses yeux s'écarquillèrent et elle laissa tomber sa mâchoire de surprise.

- Ba… Barrold !?, articula Yse avec difficulté.

- Tu t'y attendais pas hein ? , dit le libraire en éclatant de rire ; alors dis-moi, comment tu me trouves ? , lança-t-il en écartant les bras.

- Mais comment… ?

- Les explications attendront, coupa Barrold en jetant des regards à droite à gauche ; tu dois mourir de faim je parie.

Pour toute réponse le ventre de la lycéenne émit un grognement sonore. Il n'en fallut pas plus pour que le libraire explose de rire.

- Allez viens, dit-il, c'est moi qui régale.

Fin du Chapitre 6

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